L'heure était venue, le portail était ouvert. Belial attendait patiemment la suite des évènements, le retour du maitre. Assez curieux lorsqu'on connaît l'origine de son bannissement, et surtout celui qui fut responsable, à savoir Belial lui-même. Mais les choses avaient changé au fils des siècles, ou pas exactement, mais le maitre des mensonges savait quand il devait s'écraser et quand il devait sortir de l'ombre. En l'occurrence, l'allégeance à son propre père semblait être le meilleur des choix, ce dernier ne se doutant pas de la trahison de son fils préféré. Et comment aurait-il pu l'apprendre ? Il avait été à ses côtés durant l'entièreté de la guerre qui avait opposé Diablo, à présent renommé Obscure par les humains, à sa propre armée et celle de son frère Méphisto. De la même manière, il avait été à l'origine de son retour futur, organisant dans le moindre détail l'arrivée des démons passant à travers ce portail. Il n'y avait qu'Azmodan pour le trahir, le seul qui connaissait son secret et qui se trouvait sur terre à présent, bien qu'aucune information n'aie filtré à son sujet, ce dernier ayant disparu de la circulation tout simplement. Mais le secret était bien gardé de ce côté-là aussi, malgré la rancœur que son cousin lui portait. Allez avouer au seigneur des enfers que son fils était à l'origine de son départ, c'était avouer également que lui y était aussi. Et la colère l'aurait mené à une mort certaine, chose qu'un démon préfère éviter le plus longtemps possible.

Il gardait sur lui ses deux épées, symbole de son rang et de ses victoires passées. Blood, son épée, prenait place dans son dos, le pommeau pointant sur le côté gauche de son cou, et la lame traversant le dos en direction de la droite. Scourge, l'épée qu'il avait volée à son ancien allié en guise de trophée, prenait place à sa ceinture, à la droite de celle-ci. Chacune d'entre elle possédait un œil sur la garde, qui observait l'horizon d'un regard vide sur le monde. Un regard cependant qui ne voulait dire qu'une seule chose, un véritable besoin de sang, ses deux lames étaient satisfaites uniquement face à cette substance rougeâtre dont elle semblait se nourrir. Belial sorti Blood de sa maison de cuir et la fit claquer sur le sol, dans un tintement métallique. Ce bruit se répercuta à travers la plaine, dans un véritable écho se propageant, un appel aux troupes qui ne tardèrent pas à rejoindre les lieux. Des démons cornus faisaient leurs apparition ici et là, approchant lentement pour les plus impressionnant d'entre eux, ou courant à vive allure pour les plus petits, mais bien plus teigneux. Chacun d'entre eux se tenait en position de combat, les points tapant sur les armures de fer maléfique dans lequel elles étaient forgées. Un véritable chant de guerre qui devait s'entendre jusqu'au fin fond des enfers, jusqu'à l'entre de Baal. Tous devaient savoir que le seigneur revenait et qu'il allait prendre ce qui lui revenait de droit. Une ombre se faufila derrière le maitre des mensonges, ce dernier le repérant mais ne tournant même pas sa tête démoniaque pour l'accueillir.

"Alors Xazax, tu décide de te mettre au premier rang ?"

L'ombre se détacha du recoin sombre où elle avait élu domicile. Les yeux verts de la mante religieuse observaient son maitre avec insistance, avant de baisser son regard en guise de respect tout en faisant une révérence que Belial ne pouvait qu'imaginer, son serviteur restant hors de son champ de vision. Si la trahison était monnaye courante chez les démons, Xazax était un démon à part, sa loyauté envers Belial était infinie, pour une raison que l'on pouvait ignorer. Belial ne le traitait pourtant pas comme un démon de son rang, mais plus vite comme son simple souffre-douleur. Mais il n'en tenait pas rigueur, il revenait toujours dès que les ordres le lui demandait, par crainte que le châtiment réservé en cas de trahison soit bien pire. Car il n'y a pas plus dangereux que de trahir celui qui a si souvent changer d'allégeance. Et puis, l'autre caractéristique principale de Xazax, c'était son incroyable instinct de survie et être dévoué à son maitre augmentait considérablement son espérance de vie. D'un autre côté, certaines de ses "qualités" était non négligeable quand la situation en faisait appel. Toujours avec le regard plongé dans les irrégularités du sol, ses énormes paupières se refermaient sur ses yeux énormes ne possédant qu'un minuscule point en guise de pupille dans un battement de cil qui marqua un moment de surprise devant le calme de son seigneur.

Je m'excuse de cette interruption, mais Dame Lilith semble s'impatienter de revoir son époux."
"Qu'elle ne soit pas victime de trop de hâte, la patience est une vertu qu'il faut savoir apprécier."

Dame Lilith, la plus belle conquête d'Obscure sur son frère. En effet, quel plus belle victoire pouvait-il y avoir que de prendre pour épouse la fille de son ennemi, la faisant ainsi trahir son propre père et le privant d'un soutient de plus. Avec le départ de son père, cependant, Belial n'avait pas attendu trop de temps avant de se mettre à son tour dans la couche de la démone au corps sculptural. Après tout, il ne fallait pas gâcher si belle femme aux tendances nymphomaniaque et si elle lui permettait de s'approche plus près d'un ennemi, alors ce n'était qu'une bonne nouvelle, un pion de plus dans l'échiquier qui représentait la vie du démon. Il balança sa main encore libre vers son serviteur, afin de lui dire de le laisser tranquille. L'assaut risquait fort d'être donner dans les quelques minutes qui allait suivre et Xazax n'était pas un guerrier. Il pouvait assurément vous planter un poignard dans le dos ou verser dans votre verre un poison divers, mais jamais il ne voudra se sentir au centre d'un combat, là où il peut facilement prendre une balle perdue. L'énorme main difforme de la mante religieuse se déplia alors que cette dernière se redressa. Xazax était un démon d'une taille conséquente, proportionnelle à sa minceur, et ses bras, mains et doigts avaient une taille fort peu ordinaire, trainant presque sur le sol. Il redevint une ombre parmi les ombres avant que son corps ne semble s'évaporer et disparaître de la plaine. Au besoin, Belial savait qu'il pouvait compter sur lui de toute manière.

L'épée vu brandie vers le ciel au teinte rouge, l'heure venait d'arriver. Les démons se tenaient prêt à passer le portail. L'épée fendit l'air devant elle, s'abatant sur le sol. Une première vague de démons s'engouffra dans le portail, laissant un silence aux enfers, tout du moins le silence des enfers, entrecoupé de cris de douleurs provenant d'une colline voisine. Quelques minutes s'écoulèrent pendant lesquels tout le monde se tu, attendant l'inévitable. Et enfin, une main sortit du portail, il était là, il n'avait pas changé depuis les siècles, le diable rouge était de retour. Les démons, comme un seul homme, s'agenouillèrent devant lui alors que son corps avançait de plus en plus sur ce sol qu'il n'avait plus fouler depuis fort, fort longtemps. Belial planta son épée dans le sol, son autre main posée sur le pommeau de Scourge, avant d'imiter ses confrères. Il était le premier devant l'imposante carrure de son père.

"Mon maître, je suis ravi de vous revoir en si bonne forme !"

Le prince des enfers regardait son paternel se dresser devant lui, majestueux comme dans ses souvenirs. Une posture qui pouvait impressionner plus d'un démon inférieur dans les rangs. Sans même poser un regard dans leur direction, Bélial pouvait imaginer ces larves déglutir uniquement par la présence du futur maître des lieux. Mais il en fallait bien plus pour terroriser son propre fils, lui qui avait déjà vu le géant rouge chuté de son trône une fois, de la main masquée de sa propre descendance. La vanité était sans doute un caractère propre à chaque démon car comme Yrubarath, Bélial se pensait lui aussi intouchable ou alors l'était-il vraiment ? Son père lui ordonna de se relever, chose qu'il s'empressa de faire ne supportant plus de courber l'échine devant un maître. Il récupéra son arme de prédilection et la rangea dans son fourreau, laissant le bruit du métal contre le cuir comme seul variation du silence qui s'installait dans les plaines sanglantes. D'un côté des deux seigneurs se trouvaient les armées réunies par Bélial, ses propres armées depuis le départ de son père bien que beaucoup lui ont obéi avant son exil. Officiellement, il s'était battu avec son oncle pour les gagner, ainsi que les terres qu'il possédait à présent, officieusement, elles n'avaient été qu'un tribu pour son aide dans l'accomplissement de cet exil durant les derniers siècles. On aurait pu alors penser qu'une alliance venait de voir le jour entre Bélial et Méphistophélès mais il avait quitté la cour du grand roi sans même lui offrir un regard. Et depuis ce jour, il se promenait entre ses terres et le royaume des hommes, surveillant les activités de son père dans l'ombre qui l'avait vu naître. Même le démon primordial ignorait jusqu'à lors qu'il était observé par son engeance.

De l'autre côté, la cible de chaque démon présent en ce jour, la belle cité de Pandémonium, majestueuse, inébranlable, à l'épreuve du temps et des flèches, demeure du seigneur Méphisto lui-même. Nul dans la plaine ne savait si il était au courant de la venue de son frère sur cette terre qui l'avait renié mais les oreilles de cet abject démon sont partout, il y avait donc fort à parier que ses armées attendaient sur les remparts pour accueillir comme il se doit l'affrontement qui allait prendre place et napper le sol de cette couleur rougeâtre qui a tant couler au fil du temps. Yrubarath s'adressa alors à la foule d'être cornu, vêtu d'armure ayant connu une meilleure jeunesse et levant leurs armes qui aurait pu être aiguisées. Aussi curieux que cela pouvait paraître, les guerres étaient bien moins présente ces dernières années, plus personne ne convoitant le trône de son voisin. "Maintenant, chargez", voilà ce qui avait été les seules paroles de son père. Point d'éloquence ou de long discours, un art dont Bélial raffolait pourtant. Il ne s'attendait pas à de la belle prose, son père ne lui avait jamais inculqué l'art des lettres, un talent qu'il tenait de sa mère. Mais soit, les démons avides de sang n'en demandaient pas plus pour partir en direction de la forteresse, poussant des cris raisonnant à travers les plaines. Une armée de dix milles démons marchait comme un seul homme et criait d'une même voix. Le ciel s'assombrissait de ceux qui pouvaient utiliser leurs ailes et le sol répondait à leur avancement en répercutant les vibrations jusqu'aux jambes de Bélial qui se délectait du spectacle, affichant un large sourire sur son visage.

"Croyez-vous qu'il vous a réservé un bon accueil, père ?" Par bon accueil il parlait bien évidement d'un combat sanglant plus vite qu'une table dressée en son honneur. Il ne faudrait pas tarder avant d'en savoir la réponse alors que la distance séparant l'armée de la cité se réduisait de plus en plus. Les hordes infernales avaient commencé à faire raisonner leur tambour pour imposer un rythme de marche plus important. Le prince de l'obscurité leva sa main en agitant deux de ses doigts vers le vide qui se trouvait derrière eux. Il ne fallu qu'un petite seconde pour que l'infâme Xazax apparaisse une nouvelle fois, la tête baissée bien plus qu'à son habitude à la vue de l'imposant monstre rouge. Ce n'était pas tant lui qu'il redoutait mais la main de son maître s'il disait un mot de travers. Il pourtant solennellement dans ses énormes mains disproportionnées une arme qui n'avait plus vu la lumière des enfers depuis des générations. La mante religieuse se baissa à côté de celui qui répondait au nom de Ténèbres, lui laissant la voie libre pour prendre la parole. La longue arme vu levée, reposant toujours sur les membres de l'horrible démon pour arriver à hauteur du premier. "Je crois que ceci vous revient de droit." Wyrn, l'arme démoniaque qu'il avait été obligé d'abandonner retrouvait ainsi son propriétaire. Ce fléau des enfers avait soif de sang et criait d'une voix silencieuse attendant de rejoindre ce bras, seul apte à la dresser.

Le bruit des tambours se tu dans la vallée et commença le fracas des armes. Comme prévu, le seigneur des enfers attendait son frère avec impatience et ses armées défendait Pandémonium avec ferveur. Bélial posa ses mains sur ses deux épées pour les tirer de leur maison et de leur repos. Il les laissa frapper le sol dans un tintement métallique, observant le champ de bataille. Fin stratège, calculateur, le prince n'en était pas moins un combattant hors pair et un atout de poids dans une guerre. La question ne se posait pas de savoir s'il était plus ou moins fort que son père, mais il était bien plus puissant que tous ses démons s'affrontant actuellement. "Si vous me permettez." Lança-t-il à l'attention de son père avant de se tourner vers l'immense insecte qui n'avait pas bougé depuis. "Xazax, je ne peux qu'imaginer que tu préfères être n'importe où plutôt qu'ici." Prenant cette phrase comme une invitation à prouver une fois de plus sa couardise, le démon se redressa et disparu comme à son habitude. Bélial s'avança alors d'un pas déterminé dans la plaine, en direction de Pandémonium où le combat faisait déjà rage.